26/10/2009

La panne


Au milieu du Champ de Mars, Romain est assis en méditation, connecté avec la Tour Eifel, en quête de sa puissance perdue.


C’est arrivé cette nuit. A bientôt cinquante deux ans, jamais cela ne lui était arrivé, jamais ! Il ne comprend pas ! Pourtant des filles, il en a connu, de toutes les formes et de toutes les couleurs. Il les a toutes aimées, toutes ! Il les a respectées, désinhibées et révélées. Il n’a pas été l’image de la fidélité, mais jamais, ô grand jamais, l’une d’elle n’a mis en doute ses qualités d’amant ! Il n’avait pas besoin de leur demander si elles étaient heureuses, c’était une évidence.


Hier soir il était avec Clara. Cela faisait bientôt deux mois qu’il l’avait repérée. Ça se passait chez lui. Il avait tout prévu, un dîner léger, un bain chaud. Clara avait fait son numéro de déshabillage érotique, puis ils avaient dansé nus sur « Only you ». C’est sa spécialité à lui, de danser nu sur les Platters avant de faire l’amour, aucune fille n’y résiste. Mais voilà, hier soir, au moment de passer à l’acte, rien ! La panne !


Faut dire que dans l’après midi, au rayon fromages du Monoprix de la rue Didot, il était tombé sur Barbara, la mère de ses enfants. Après quoi, il était passé aux boissons et il s’était pris un pack de quatre bières, il lui fallait bien ça ! Deux pour lui, une pour Clara et l’autre parce qu’elles sont vendues par quatre. Dès qu’il a été chez lui, il a décapsulé la première. C’était trop bon et Clara se faisait attendre, il a pris la deuxième. Clara a préféré une eau gazeuse, alors il a bu la troisième. Ce qu’est devenue la quatrième, il ne sait plus.


Et puis, il y avait l’image de Barbara qui surgissait à chaque instant. Tandis que Clara dégrafait son soutien-gorge afin de libérer une poitrine généreuse, lui il pensant aux petits seins de Barbara, avec leurs tétons pointés vers le ciel. Et quand il lui a mordillé l’oreille au moment de « For it's true, you are my destiny. » c’était pour Barbara qui aimait tant ça. Après, quand il s’est allongé sur elle, lui murmurant « ô Barbara ! ma douce Barbara ! Viens Barbara ! », Clara lui a demandé si s’agissait d’une chanson des Platters. C’est à ce moment là que tout s’est enrayé. C’était fini !


Clara lui a dit gentiment « c’est pas grave, ça arrive à tous les mecs », n’empêche qu’elle s’est rhabillée et elle est partie. Ce matin il s’est réveillé avec la gueule de bois. Faut dire qu’après le départ de Clara, il est descendu chez l’arabe, qui était juste en train de fermer et il a repris un autre pack de bière. Ce matin, après un café très fort, il s’est fait quelques sites pornos et s’est repassé toutes les photos de Barbara. Toujours rien !


Alors il a fait la tournée des phallus de Paris. Il a commencé par la colonne de la Bastille, mais le génie, levant la patte sur les passants, pour mieux exhiber ses attributs, c’était une provocation ! Ensuite, il a filé à Nation. Là, il est arrivé trop tard, les colonnes du trône venaient d’être démontées, on lui a dit de revenir fin 2010. Napoléon sur la colonne Vendôme, ça ne l’a pas fait bander du tout et celles de Buren lui ont rappelé l’armée. Autour de l’obélisque de la Concorde, il y avait trop de bruit pour qu’il puisse se concentrer.


Il est bientôt 21 heures, la nuit est maintenant tombée et la Tour Eiffel a revêtu son habit de lumière. Dans sa posture méditative, Romain sent venir le retour de sa virilité. Il est juste 21 heures, la Tour Eiffel scintille de ses vingt mille flashs. Entre les jambes de Romain une colonne entame sa renaissance !


Allo Clara ? C’est Romain. Je t’attends sur le Champ de Mars. Viens vite, j’ai une surprise pour toi !


A consulter en cas de panne :

La Tour Eiffel :

http://www.onlineradio.fr/wp-content/uploads/2009/03/la-tour-eiffel-au-couleurs-de-l-europe_2.jpg

Le Génie de la Bastille :

http://marais.evous.fr/Le-Genie-de-la-Bastille.html

Only you :

http://www.youtube.com/watch?v=9r2pEdc1_lI

Et surtout Barbara :

http://www.youtube.com/watch?v=BHqAllSQ_eM&feature=related


19/10/2009

Mesures de précaution


Je ne fume pas et je ne prends pas d’excitant, alors à l’heure de la pause café je drague. Je rejoins mes collègues alignés, un gobelet dans une main, une cigarette dans l’autre, sur le trottoir de la contre allée qui borde l’immeuble de la Exon Consulting Group.

Ce matin, comme tous les matins, je m’approche de Victor Delmas du bureau 405, pour lui faire la bise. Mais lui, il me tend la main, comme si on n’avait jamais fait des heures supp ensemble, cachés dans l’infirmerie. J’y crois pas, je me rapproche pour vérifier, il me tourne carrément le dos, pour continuer sa discussion avec Germain Guillermot.


- Atchoum !!!

Silence ! Derrière les volutes de fumée, juste au dessus des vapeurs de café, une douzaine de paires d’yeux sont braqués sur moi. Je m’inquiète.

- Qu’est-ce qu’il y a, j’ai dit quelque chose ?

- Ta manche ! me crie Arnaud Vernon de la DRH.

- Quoi ma manche ?

- Les mesures de précaution, précise-t-il, éternuer dans sa manche, ça ne te dit rien ?

- Justement, dis-je, des manches, j’en ai pas !

Arnaud Vernon et moi, tous les deux dans le même isoloir, pendant les élections des délégués du personnel, les mesures de précaution, il les mettait où ce jour là ?


- Tiens tiens ! Qu’est-ce qui t’arrive aujourd’hui Germain, tu as oublié ta cravate ?

Monsieur Germain Guillermot de la Dir Com : costard trois pièces de chez Tati, fausses Westons, fausse Rolex, fausses Rébanne et cravate assortie.

- Ca t’arrive de lire les circulaires ? me répond-il énervé.

- Oh excuse moi ! J’avais oublié les mesures de précautions et la cravate, cette pauvre cravate, déclarée repaire de virus !

Un après midi où Monsieur Germain m’avait donné rendez-vous aux archives, j’avais senti que la dernière visite au pressing du costume trois pièces, devait remonter à plusieurs mois. Ajouté à cela son parfum contrefait qui avait viré à la « cata », j’avais abrégé la rencontre. Là, peut-être qu’il m’en veut encore.


Y a plus rien à espérer aujourd’hui, il vaut mieux que je remonte. Je m’apprête à repartir quand je vois arriver le Antonio de la Repro. Antonio, le tombeur de la photocopieuse qui ne m’a pas encore fait tomber, ça tombe bien ! Je lui tends la main par souci de précaution. Plus prévoyant que moi, il garde la sienne dans sa poche, mais me gratifie d’un magnifique sourire. - Attention Antonio ! A mon avis tu prends des risques à sourire ainsi de toutes tes dents.

- Tu as raison me répond-il, je crois que je vais mettre un masque.

- Dommage, une si belle gueule !


Le stresse me gagne, pour me calmer je vais chatter sur Proxirencontres. Mais je m’inquiète, est-ce qu’il y a aussi des précautions à prendre ? Est-ce que je peux attraper un virus qui circule sur le net ? Est-ce que je dois utiliser du gel désinfectant ? Et si une rencontre virtuelle se transforme, d’accord on ne pourra pas s’embrasser sur la bouche, mais le cunnilingus ?