Elle marchait en roulant des hanches. Elle allait libre des regards posés sur elle. Sa robe de soie légère dansait sur son corps nu, en rythme avec ses pas, à contre temps de la brise qui, dévoilant le fuseau de ses cuisses, laissait deviner l’intérieur velouté.
Si elle posait sa main sur le bas de son ventre, ce n’était pas pour retenir sa jupe, mais pour sentir plus fort, le souffle s’immiscer entre ses lèvres humides et remonter tout le long de son corps en gonflant le tissu qui, l’instant d’après venait s’aplatir sur ses formes.
L’air autour d’elle était flux et reflux. Telles les vagues léchant les rochers, le courant frais envahissait ses creux, inondait ses cambrures et venait s’évanouir sur ses galbes arrondis. Puis il se retirait pour mieux se réformer.
C’est ainsi qu’elle allait sous les platanes de l’avenue.
Et puis, sortant de l’ombre aux abords du chantier, les sifflets ont fusé sur les échafaudages. Elle a continué sa marche régulière, mais dans son intérieur, l’air est devenu très chaud.
Oser s’arrêter, s’étirer et s’ouvrir au soleil, à l’homme, à l’univers, pour se fondre dans l’énergie du tout. Qu’il vienne la prendre ici, contre la palissade, les bras cloués en croix, elle se donnerait à lui. Qu’il l’écarte, qu’il la pénètre, qu’il plonge en elle. Qu’elle referme sur lui ses jambes en prière, ses fesses soutenues dans des mains calleuses. Qu’elle puise dans les vivas et les insultes, sa toute puissance jusqu’ici retenue. Que la source jaillisse, qu’elle forme une rivière, un fleuve et rejoigne la mer.
Par-dessus son épaule, elle a jeté un regard vers les échafaudages et tous ces yeux concupiscents braqués sur elle ont eu raison de son audace. Alors elle a continué sa route, faignant de ne point avoir peur.