10/11/2008

Clémentine Le Poivre est malade


Ah ça alors ! Je me suis arrachée des bras de mon amant parce que je me suis fixé pour contrainte de ne pas manquer un seul cours de tango cette année, vu que j’ai pour objectif de me présenter au concours du Latina en février prochain.

C’est mon psy qui m’a dit « Si vous voulez continuer à vivre, il faut vous fixer des objectifs, poser des actes et vous astreindre à respecter vos engagements ». Alors sur ses conseils j’ai décidé de suivre le cours de danse de Clémentine Le Poivre, à la maison des jeunes, tous les mercredi de 19h30 à 21h30.

Et il avait raison mon psy, rien ne vaut l’engagement pour se remotiver. Le lundi j’ai un atelier d’écriture, le mardi gym douce, tango le mercredi, tantra le jeudi, le vendredi je vais au café phylo, juste après ma séance chez le psy, le samedi je fais la lessive et le ménage en grand, je me fais les ongles, un brushing, un masque de beauté, je cire mes chaussures et le soir je vais au cinéma avec ma copine Brigitte. Le dimanche après « Panique au Mangin Palace » je vais déjeuner chez ma mère et ensuite je m’entraîne avec Pedro pour le concours du Latina.

Maintenant ça va, je suis parfois fatiguée mais j’en ai fini avec ma déprime chronique. D’ailleurs j’ai rencontré un amant au tantra et nous nous retrouvons de cinq à sept le mercredi et quelque fois le lundi pour les travaux pratiques.

Aujourd’hui nous étions tranquilles tous les deux, nus sur une peau de bête devant la cheminée où crépitait un feu de bois parfumé à l’encens de santal. Moi j’avais bien envie de laisser tomber Clémentine Le Poivre et son tango, mais en pleine Kundalini j’ai entendu la voix de mon psy me dire« Si vous voulez continuez à vivre, il faut... etc »

Alors je me suis rhabillée et je suis partie affronter le froid sur mon petit vélo avec mes chaussures de danse dans mon sac à dos.

J’arrive et voilà que Clémentine Le Poivre est malade.

Malade ! mon œil. Je suis certaine qu’à cette heure elle est allongée nue sur une peau de bête, près de son amant, devant la cheminée où crépite un feu de bois parfumé à … Parce que elle, elle n’a pas entendu la voix de son psy lui dire que si elle veut continuer à vivre, il faut, etc ; etc…

Petit conte pour les jardiniers


Timothée était malheureux. Depuis sa naissance il se traînait le dos affublé d'une vilaine bosse. A l'école les enfants se moquaient de lui, les plus méchants lui jetaient des pierres et maintenant qu'il venait d'avoir dix huit ans, on le regardait avec un air condescendant. Dans les yeux des autres, il lisait qu'on pensait de lui « le pauvre ». Il s'était dépassé sur le plan intellectuel, mais côté affectif, il craignait de ne connaître à jamais que la solitude.

Au salon Zen de la porte de Champerret où il s'était rendu, dans l'espoir de découvrir une démarche spirituelle, qui lui ouvrirait de nouveaux horizons, il était tombé sur une soirée organisée au « jardin des espaces ». Cette soirée intitulée « Vivez un conte de fées » proposait aux participants de venir costumés en personnage de conte pour vivre une expérience inoubliable.

Timothée avait pensé avec désabusement « pour moi ça ne sera pas difficile, même pas besoin de déguisement». Et puis, plus tard en y repensant l'idée lui était venue, de se fixer comme défi d'y aller pour exhiber sa bosse. Et c'est ce qu'il fit.

On le félicita tellement pour ses talents de transformation, qu'il se prit à penser qu'il était Lagardère déguisé en bossu pour venger le Duc de Nevers. Les filles voulaient toucher son porte bonheur. Une princesse orientale sortie des « Milles et une nuits », voulut en toucher davantage. Elle lui fit découvrir une sensation, qu'il ne connaissait pas.

Il l'entraîna plus loin, à la recherche d'un coin tranquille. Elle l'attira dans le jacuzzi afin d'explorer ensemble leurs particules élémentaires. Il était tellement excité qu'il se mit tout nu et oublia sa bosse. Elle était tellement émerveillée, qu'elle se laissa bercer dans le courant chaud, suspendue à l'épaule de son chevalier. Ils dansèrent longtemps l'un contre l'autre, dans une apesanteur bleue aux parfums d'orient, tantôt volant sur un tapis de Perse au dessus des palets d'Ispahan, tantôt nageant au milieu des anges-poissons, des labres et des coraux, dans la baie d'Aqaba.

Le lendemain ils quittaient le jardin parce qu'ils s'étaient trouvés. On dit que l'amour rend aveugle, mais moi je pense qu'il fait fondre les bosses et tout ce qui dépasse pour empêcher d'atteindre le bonheur.