19/12/2009

Ils n’ont jamais gardé les vaches ensemble.


Ils n’ont jamais gardé les vaches ensemble, mais de nos jours, qui garde encore les vaches, alors qu’il suffit juste de brancher la clôture électrique, pour qu’elles se gardent toutes seules ? Il a donc branché la clôture électrique et les voilà tous deux partis à la recherche d’une meule de foin, afin de batifoler au milieu des herbes sèches. Cependant à l’heure du round baller, allez donc trouver une meule de foin, capable d’accueillir un couple d’amoureux ! Vous les imaginez, tous les deux perchés en équilibre sur une balle ronde, se conjuguant dans des postures acrobatiques ! Optant pour des jeux simples, ils ont préféré partir plus loin, caracoler tous nus dans la rivière. Là c’était les algues vertes, les rejets nitriques et les effluves nauséabondes qui les attendaient. Déçus, mais pas dépourvus, ils se sont rhabillés et il l’a emmené faire un tour sur son tracteur.


Un magnifique tracteur vert de cent cinquante chevaux, avec fauteuil à suspension pneumatique, son stéréo Hi-fi, cabine insonorisée, air conditionné et vitres teintées. Ils se sont fait tout les Beatles remasterisés en fanant le pré de la grande Noue, cinq hectares, soixante quinze ares et douze centiares. Tantôt c’était lui qui était aux commandes, tantôt c’était elle. A la fin, l’herbe était en vrac et totalement fanée, tandis qu’elle était toute fraîche et complètement emballée. Et puis ce fut l’heure de la traite.


Elle se faisait une joie de presser le pis des vaches pour en extraire le bon lait chaud. Mais que nenni ! Fini le massage des mamelles laitières ! En moins de temps qu’il n’en faut pour le dire, le pis est lavé, désinfecté et connecté au réseau qui va en quelques secondes, extraire le lait et le refroidir, avant qu’un microbe n’ait l’idée de s’aventurer jusqu’à lui. Elle qui avait rêvé d’un bain de lait chaud, dans un grand baquet de bois, elle a vite réalisé que tout se passait en circuit fermé dans l’inox, le verre et le froid. Dans un décor de laboratoire high tech, elle est restée éberluée à regarder se dérouler les temps modernes de la salle de traite et Charlot s’activer sur le Dixit Dominus de Handel. Car si la vache rumine avec un air bovin, ce n’est pas pour autant qu’elle n’apprécie pas la grande musique et le Charlot aussi.


Elle est revenue le lendemain, espérant un autre tour de tracteur, mais il était déjà parti, étendre son fumier sur les Champs Elysées, afin d’y récolter des subventions.


Elle a marché très loin remontant la rivière. L’odeur nauséabonde avait disparue depuis longtemps, lorsqu’elle est arrivée à sa hauteur. Allongé dans l’herbe, il regardait ses vaches paître la fétuque des prés, le trèfle et le sainfoin. Quand elle lui a demandé pourquoi il n’avait pas de clôture électrique, il a montré ses chiens. Puis, il l’a prise par la main pour l’emmener batifoler dans une meule de foin et jouer dans la rivière. A l’heure de la traite, elle a pressé le pis des vaches et bu le lait tiède à même le seau. De sa langue, il a retiré la mousse qu’elle gardait sur ses lèvres.


Demain, elle reviendra garder les vaches avec lui !