18/05/2010

Moi, je m’appelle Cécile !


Un jour, mais il y a de ça très longtemps, un type qui est venu brailler sous ma fenêtre en pleine nuit. Il disait que, comme l’assassin il revenait sur les lieux de son crime, mais son amour n’était pas mort et il voulait recommencer. Il était complètement bourré et se prenait pour Roméo. Moi qui venais juste d’aménager dans cet appart, ça commençait mal, j’ai pas fermé l’œil de la nuit. Le matin quand je suis descendue, la concierge m’attendait dans le hall

- Alors c’est vous la fameuse Marie Christine, qui fait hurler sous son balcon en pleine nuit ?

- Ah non ! moi je m’appelle Cécile et j’ai rien à voir avec cet ivrogne, je ne le connais pas

- Ah bon ! pourtant il était bien sous votre balcon.

Il était sous mon balcon et alors ! Qu’est-ce que je pouvais y faire ?


La nuit suivante il est revenu et ça a recommencé. Il était complètement rond et il disait qu’il était rongé de remords, qu’avant il était un vrai salaud, mais il jurait qu’il avait bien changé. Là, il venait de trouver un boulot et il avait balancé son dictionnaire de rimes. Moi je n’arrivais pas à dormir et quand je suis descendue le matin, tous les voisins de la cage d’escalier m’attendaient dans le hall.

- Allez Marie Christine ! disait l’un. Montrez-vous magnanime, donnez lui une chance encore !

J’avais beau dire que je m’appelais Cécile, personne ne m’écoutait

- Vous voyez bien qu’en lui il a du bon, disait un autre

- Il n’écrit plus de chanson, rajoutait la concierge.

J’ai quand même réussi à me sauver, cependant je peux vous dire que je n’en menais pas large. Mais qu’est-ce que je pouvais faire ?


Bien sûr, ça ne s’est pas arrêté là, car la nuit suivante il est revenu avec tous ces copains. Ils étaient tous complètement saouls, sous mon balcon. Ils étaient là en train de pousser des cris unanimes et me demandant de ne pas faire la sourde oreille. Sourde ! voilà bien comment j’aurais voulu être à ce moment là. Ça a encore duré toute la nuit, mais le matin y avait personne dans le hall, quand je suis descendue, là j’étais soulagée. Cependant, quand je suis sortie dans la rue, tout le quartier était là.

- Allez Marie Christine ! donnez lui une chance encore, recommencez !

- Vous voyez bien que maintenant ses copains rigolent sans lui

- D’ailleurs ils sont là, vous n’avez qu’à leur demander

Moi, je n’ai même pas essayé de leur dire que je m’appelais Cécile, ça n’aurait servi à rien. Alors je l’ai laissé monter chez moi, puisque ça faisait plaisir à tout le monde et j’ai attendu qu’il dessaoule. Qu’est-ce que je pouvais faire d’autre ?


Quand il s’est réveillé vers cinq heures de l’après midi, il m’a demandé qui j’étais, je lui ai répondu que je m’appelais Cécile. Quand il m’a demandé où était Marie Christine et je lui ai répondu qu’elle était partie et que j’étais la nouvelle locataire. Je lui ai proposé un café, il en a repris trois tasses et il est parti en me disant qu’il allait chanter. Quelques années plus tard, quand j’ai entendu la chanson où il parlait de sa fille Cécile, ça m’a fait quelque chose. Mais lui, qu’est-ce que ça pouvait lui faire ?